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19 mars 2018 1 19 /03 /mars /2018 17:02

Retour de Palestine.

 

Ils sont là qui nous attendent de l’autre côté du check-point qui sépare Jérusalem de Bethléem. Eux n’ont pas pu le franchir. Eux, ce sont Nermin, Shaker, Sara, Rasha et d’autres, une vraie délégation. Nous les connaissons pour les avoir reçus ou pour les avoir déjà rencontrés chez eux. Ils sont heureux de nous voir, nous aussi.

Commence une semaine d’invitations chez les uns, chez les autres. Nous faisons le tour des familles. A chaque fois l’accueil est magnifique.

Le lendemain de notre arrivée, un vendredi, nous restons à Halhul chez Rasha quasiment toute la journée. Nous apprendrons plus tard que des affrontements sont fréquents ce jour-là. Donc pas de sortie.

Notre temps se partage entre les visites de Ramallah, Bethléem, Jéricho, Hébron, les réceptions officielles et les repas pantagruéliques. Nos amis sont joviaux, cordiaux.

Mais au fur et à mesure que l’intimité grandit, le vernis se fissure. Nous sommes reçus par des familles de « martyrs » qui nous montrent les photos de leurs fils tués par des militaires israéliens. (Hamza, 23 ans, est mort en février de cette année) J’émets une réserve sur le terme « martyr», « victime » me semble peut-être plus approprié. Non. Quiconque ici participe à une manifestation sait qu’il risque sa vie.

Nous passons une soirée chez Imad et Jasmine. Il y deux ans, leurs deux fils aînés alors âgés de 14 et 16 ans, sans doute repérés lors d’une manifestation ont vu débarquer chez eux en pleine nuit une dizaine de militaires qui les ont emmenés dans des conditions de grande violence. Ils ont passé 9 mois en prison sans autre forme de procès. L’un des garçons ce soir-là nous raconte. L’autre est mutique, fermé, traumatisé. La scène de l’arrestation a été filmée par les caméras qu’Imad a fait installer autour de sa maison, maison qui se trouve en zone C, ce qui veut dire qu’elle peut être détruite du jour au lendemain par les israéliens.

Nous apprenons que 60 % des familles ont ou ont eu un père, un frère… emprisonné ou tué.

Lors de nos sorties vers d’autres villes, nous les sentons nerveux, perpétuellement inquiets. En fait, ils ne se déplacent qu’en cas de réelle obligation. Faire du tourisme, ils ne savent pas parce qu’ils ne peuvent pas. Sur la route un militaire israélien nous fait signe de nous arrêter, arme pointée sur la voiture. Shaker, jeune homme de 28 ans, est visiblement terrorisé. En nous apercevant -trois femmes occidentales- le miliaire fait signe de passer. Les israéliens tiennent à leur image de marque auprès des occidentaux…. Quelle ironie !

On comprendra que nos amis vivent tous dans la peur, et dans un très grand sentiment d’humiliation.

Partout des colonies, de plus en plus nombreuses, qui gagnent inexorablement sur les terres. Et puis le mur de la honte, les check-points, les militaires. Tout le temps, des contrôles, des autorisations à demander. Tout est compliqué.

Partout aussi des camps de réfugiés. Réfugiés depuis qu’en 48 leurs villages ont été détruits, leurs maisons rasées. Jusque quand seront-ils des réfugiés dans leur propre pays ?

A l’entrée de zone sous contrôle palestinien, des panneaux israéliens : « vous entrez en zone palestinienne donc en zone dangereuse, à vos risques et périls » Nos amis nous disent : les terroristes, c’est nous, c’est bien connu !

Dans la vieille ville d’Hébron, le harcèlement est tel (2000 militaires pour protéger 400 colons) que nombre de magasins ont fermé, des rues sont interdites de circulation, le souk se vide, on ne laisse les enfants se déplacer que pour se rendre à l’école. Cela représente un risque au quotidien.

Deux tourniquets filtrent l’accès à la partie israélienne de la ville. C’est un militaire qui, de sa guérite, décide de qui passera et au bout de combien de temps ….

Partout, nous entendons « il faut témoigner, il faudra dire ce que vous avez vu et entendu » Oui, nous le ferons.

Mais comment retranscrire au plus juste la terrible réalité de leur vie ?

Coloniser c’est « mettre un pays sous sa dépendance économique »

Il y a à propos de la Palestine une erreur de sémantique. Il s’agit en l’occurrence de priver un peuple de ses terres, de ses droits, de sa liberté, il s’agit de le faire disparaître.

Je fais gentiment remarquer à Shaker que peut-être il fume trop : « c’est la seule liberté qui me reste »

Nermin a demandé un visa pour nous raccompagner à la fin de notre séjour à Jérusalem. Visa refusé.

Les israéliens vont en mai « fêter » la création de leur état. Les palestiniens vont célébrer les 70 ans d’occupation, de guerre, de spoliation.

Nous témoignons.

Nous ne les oublions pas. Pas plus que nous n’oublions les syriens, les kurdes, les yéménites, tous les peuples en souffrance.

Halhul – Mars 2018

Claudie Sennator

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14 novembre 2017 2 14 /11 /novembre /2017 17:49
Depuis la prison du Néguev, Salah Hamouri nous adresse ces quelques mots.

"J’ai ressenti une étrange sensation, lorsque, le 23 août, aux alentours de 4h30, si je me souviens bien, j’étais tiré de mon sommeil par des bruits sourds. Quelqu’un s’acharnait sur la porte de mon appartement et appuyait nerveusement sur la sonnette à répétition. Je me suis dit que je connaissais ce type de vandalisme mais dans les toutes premières secondes, je pensais qu’il s’agissait d’un rêve. Je vis dans un bâtiment de six étages, à Jérusalem-Est. Chaque étage est composé de deux appartements. Les soldats et leur commandant ne savaient exactement dans quel appartement je vivais, alors, ils ont frappé brutalement à chaque porte. J’ai alors eu une pensée pour mes voisins, tous réveillés en plein nuit par les soldats, terrorisant chaque famille, je pouvais entendre des enfants pleurer.
 
Les soldats n’ont pas cessé de frapper sur ma porte jusqu’à ce que je finisse par ouvrir, encore engourdit par le sommeil. Le premier soldat que j’ai vu portait une cagoule. Je ne pouvais voir que ses yeux remplis de haine. Il m’a alors hurlé dessus, me demandant ma carte d’identité. Après vérification, les soldats présents ont appelé du renfort, en criant qu’ils avaient trouvé la personne qu’ils cherchaient.  A la seconde où j’ai compris que la force occupante venait bien pour moi, mon cerveau m’a envoyé un ordre clair : « Une nouvelle bataille commence là pour toi, cet ennemi ne doit pas te vaincre une seule seconde ». Ils m’ont forcé à m’asseoir sur une chaise et trois soldats m’entouraient, leurs armes pointées sur moi. Pendant ce temps-là, leurs collègues ont fouillé tout l’appartement, bouleversant les meubles, les livres, les vêtements… Je les sentais fébriles, ils s’énervaient, ils ne trouvaient rien de ce qu’ils cherchaient dans cet appartement. Le commandant a fini par donner l’ordre de repli. Ils m’ont alors ordonné de m’habiller pour partir avec eux. En marchant vers la porte d’entrée de mon appartement, avant d’en sortir pour une durée qui m’était inconnue, je fixais la photo de mon fils accrochée au mur. Dans son regard, j’ai puisé de la force pour affronter les durs moments qui m’attendaient. Je l’imaginais me dire « Papa, sois fort, on sera vite réunis tous les trois ». Je lui promettais alors de rester fort et de ne jamais donner l’occasion à cette occupation de nous confisquer notre humanité et de détruire notre vie comme elle s’acharne à le faire. Ils me bandèrent ensuite les yeux et me conduisaient dans une voiture blindée. La marche vers ce nouveau destin commençait. Une marche pénible vers un monde que je ne connais que trop bien. Un monde dans lequel nous devons rester forts, humains et garder notre sourire en toute circonstance. Une nouvelle fois, je suis conduit dans ce véhicule blindé vers l’endroit le plus sombre et le plus misérable pour un être humain : une prison de l’occupant.
 
En arrivant dans la prison du Neguev, après deux semaines passées dans le centre d’interrogatoire,  tout me semblait tristement familier. Je suis rentré dans la section 24, j’ai vite reconnu les visages que j’avais quittés il y a quelques années. Je n’ai pas su quoi leur dire, j’étais soudainement impressionné de les retrouver ici. Parmi eux, certains sont derrière les barreaux depuis plus de quinze ans. Ils me questionnaient et je ne savais pas quoi leur répondre. « Qu’est ce qui est arrivé, pourquoi es-tu là ? ». Je n’avais pas les réponses à leurs questions. Pas plus que je n’arrivais à leur parler de l’extérieur, eux, qui sont là depuis tant d’années. Que faisons-nous pour eux, pendant qu’ils paient le prix de leur lutte ? En les retrouvant, je me demandais si j’avais assez agi pour parler d’eux à l’extérieur. On a ensuite énormément discuté. Un détenu m’a dit « Ah tu es de retour, on va parler de nous en France alors ! ». J’ai réalisé alors que malgré ma nouvelle privation de liberté, je n’avais aucun doute sur le fait que la mobilisation allait se mettre en place en France, c’est un véritable espoir pour moi et pour eux.  J’ai pensé à toutes les personnes qui avaient déjà lutté pendant ma première incarcération et depuis, toutes celles et ceux que j’ai rencontrés en France et en Palestine. Aucun doute qu’ils seraient tous à nouveau au rendez-vous pour dénoncer l’injustice qui nous frappe.
 
Et des éléments que je reçois par fragments, je sais que vous êtes même plus nombreux que la dernière fois ! Des personnalités que j’apprécie, des élu-e-s, des citoyen-ne-s en nombre plus nombreux encore vous vous êtes mobilisés pour dénoncer  l’injustice, l’arbitraire et pour exiger ma libération.
 
Je vous en remercie très sincèrement. Je veux vous dire aussi que je serai digne du soutien que vous m’accordez. On ne marchande pas la liberté même si on la paie parfois très chère. Ce n’est pas une question d’entêtement mais de dignité et de principe : pour la liberté je ne lâcherai rien. Le peuple palestinien, comme tous les autres, ne veut pas vivre à genoux. Et quelle force cela nous procure que de savoir que, vous aussi, vous n’avez pas l’intention de lâcher. Cela, l’occupant ne le mesure pas. Moi je le ressens au fond de moi. Et c’est pourquoi même quand il pleut je pense au soleil qui vient…"

Salah Hamouri
Novembre 2017, prison du Néguev, section 24











Amitiés,

--
Association France Palestine Solidarité (AFPS) 
21 ter Rue Voltaire 75011 Paris 
Tél. : 01 43 72 15 79 
Fax. : 09 56 03 15 79 
Suivez l'AFPS sur www.france-palestine.org, Facebook et Twitter
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31 janvier 2017 2 31 /01 /janvier /2017 10:36
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27 janvier 2017 5 27 /01 /janvier /2017 16:39
Israël et sionisme : lumière sur une idéologie et sa propagande

30 DÉC. 2016

PAR RAY ELSA

BLOG : LE BLOG DE RAY ELSA - MÉDIAPART

Retours sur un échange passionnant avec Nurit Peled-Elhanan, enseignante-chercheuse israélienne, dont les travaux nous éclairent considérablement sur l'idéologie sioniste et sa propagande.

Peut-être connaissez-vous Nurit Peled-Elhanan ?

Il est bien dommage qu'elle ne soit pas davantage connue et reconnue en France.

Ses travaux sont traduits en de nombreuses langues, mais pas en français. Son livre n'est disponible que sur Internet et acheminé via la Grande-Bretagne, on ne le trouve pas en France dans les sites classiques de distribution.

Je me suis entretenue avec elle hier matin par Skype, n'ayant malheureusement pas eu l'occasion de la rencontrer à Jérusalem durant mon récent séjour. Nurit est en effet israélienne et vit à Jérusalem-Ouest. Elle est professeure de sciences du langage à l’université hébraïque de Jérusalem, et est également chercheuse et militante.

Je ne vais pas vous parler ici de son passé, de son histoire ou de ses activités militantes, car ce n'est pas là-dessus que nous nous sommes entretenues. Par ailleurs, ce sont des éléments que vous pouvez trouver sur Internet.

Non, je souhaite plutôt vous parler de ses travaux, qui sont aussi passionnants qu'édifiants.

En effet, Nurit Peled-Elhanan a étudié en profondeur les manuels scolaires israéliens, et plus précisément les discours racistes dans la représentation des Arabes/Palestiniens dans lesdits livrets. Actuellement, Nurit travaille sur Israël en tant que « colon-colonisateur » et plus spécifiquement sur son système d’oppression sociale, culturelle, politique et religieuse des minorités (juifs arabes, éthiopiens, yéménites, etc.).

Elle a décortiqué pendant des années les manuels scolaires, visité et fréquenté les écoles, parlé aux élèves, aux instituteurs, aux directeurs d’établissements, etc. Et son étude fait froid dans le dos !

Elle m'en a résumé quelques aspects fondamentaux, avant que je puisse la lire complètement.

Elle explique par exemple comment Israël pratique « l’éducation à l’holocauste ». « On apprend aux enfants israéliens que les Juifs sont sous la menace constante d’un holocauste imminent et que donc pour l’éviter, il faut imposer un holocauste aux autres. » Le but est d’en faire des soldats, des machines à tuer sans réfléchir et sans contester. Car le service militaire est obligatoire en Israël à partir de 18 ans, il est de 3 ans pour les garçons et 2 ans pour les filles. Et les hommes restent mobilisables jusqu'à 55 ans. « Tout cela est très agressif » ajoute Nurit. « C’est de l’endoctrinement et de l’empoisonnement mental qui commence dès 3 ans et se poursuit jusqu’à 18 ans. »

Depuis la publication de son livre, elle est bannie de toutes les conférences qui évoquent le sujet. Classique… Elle enseigne néanmoins toujours à l’Université hébraïque, où elle tente d’éveiller les consciences. Elle participe également à des conférences et séminaires sur les sciences du langage, l'écriture et le racisme dans l'éducation.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que Nurit ne mâche pas ses mots, et qu’elle sait de quoi elle parle. Née en Israël, de parents israéliens déjà très critiques envers le sionisme et le gouvernement israélien, elle dévoile des réalités dont on ignore souvent tout en Europe !

« Je crois qu’Israël est le seul pays au monde qui fait venir les gens pour ensuite les discriminer ». Effectivement, dans sa politique démographique et sa logique d'occupation de la terre, Israël fait venir des juifs des quatre coins du monde, leur faisant miroiter toutes sortes de choses, les attirant avec de belles promesses. Au final, pour les minorités non-blanches, c’est la discrimination et l’oppression qui les attendent. « C’est un génocide culturel en cours depuis les années 50 » s’exclame Nurit.

Les éthiopiens, les marocains, les yéménites… Tous ceux qui ne sont pas blancs, pas européens, sont discriminés, agressés, sommés de changer de culture et de pratiques religieuses.

« Je crois que le pays le plus antisémite au monde, c’est Israël ! Parce que les Juifs sont persécutés pour leur façon de pratiquer le judaïsme. On ne peut pas pratiquer son judaïsme librement comme dans le reste du monde. Les Éthiopiens par exemple, quand ils arrivent on exige d’eux qu’ils se reconvertissent! Alors qu’ils sont juifs depuis des générations, on leur fait comprendre qu’ils ne sont pas juifs. Ils sont même parfois re-circoncis ! C’est horrible ce qu’ils subissent »

Nurit explique que le sionisme est une idéologie occidentale, blanche, laïque, qui se sert de la religion à des fins politiques.

Je commence à mieux comprendre pourquoi Israël est tant soutenu par les puissances occidentales. Car au bout du compte, il reproduit le même schéma de domination des minorités, le même schéma de colonisation et d’oppression sociale, culturelle et politique que ses « alliés ». Le sionisme n'est rien d'autre qu'une idéologie blanche de domination, et la dernière "démocratie" coloniale du monde, à l'aube de 2017. Combien de gens pensent encore que l'État d'Israël a été créé en réponse à l'holocauste? Combien de gens sont persuadés que le sionisme date de 1945? Alors qu'il s'est développé bien avant la shoah et que les négociations pour la création d'un État juif avaient déjà débutées bien avant la guerre.

Quand on commence à changer de prisme, à s'extraire des discours dominants et des langues de bois, à écouter celles et ceux qui sont experts sur la question, à s'intéresser aux recherches et expériences des rares israélien-ne-s qui remettent tout cela en question, les masques tombent et la réalité devient beaucoup plus claire. Ce qu'on appelle aujourd'hui et depuis quelques années - à tort selon moi - "le conflit israélo-palestinien" est en réalité tout sauf un conflit !

C'est une colonisation en bonne et due forme d'un pays par un groupe de gens venus d'Europe qui depuis presque 70 ans pillent les terres, tuent celles et ceux qui se placent en travers de leur route, refusent toute négociation de "paix" ou compromis, méprisent les lois et les droits humains les plus basiques, et ont construit leur État sur le sang, les ruines et sur une idéologie raciste. Non ce n'est pas un conflit et ça ne l'a jamais été.

D'ailleurs, peut-on parler de conflit ou de guerre quant l'une des deux parties a, à l'origine, été attaquée par surprise sans comprendre ni connaître les réelles motivations des attaquants ? Les Palestiniens se sont retrouvés du jour au lendemain, au printemps 1948, au cœur d'une tempête qu'ils n'avaient pas vue venir, et qui ravageait tout sur son passage.

Concernant les Palestiniens justement, Nurit explique qu'ils n'existent pas dans la conscience collective israélienne. C'est à dire qu'ils n’existent pas en tant qu'êtres humains, en tant que peuple, en tant que culture. Ils ne sont mentionnés dans les manuels scolaires que sous forme de problèmes, problèmes qu’il faut éliminer d’une manière ou d’une autre. A aucun moment ils ne sont considérés comme des êtres humains.

La Nakba (1948) est présentée dans les manuels comme "une guerre" et les massacres qui en ont découlé sont considérés comme légitimes. Il fallait "gagner" cette terre, puis relier Tel Aviv à Jérusalem, en faisant le ménage au passage...

Dans le cadre de son étude, Nurit constate que la rhétorique dans les manuels scolaires est de pire en pire depuis les années 70. « Ils sont devenus des manifestes politiques et religieux, les faits ont disparu, ne reste que l’idéologie. »

Parallèlement à cela, Nurit pointe une jeunesse israélienne de plus en plus raciste. Bien sûr! Avec un gouvernement formé par des gens ouvertement racistes, cela ne peut que renforcer les discours et actes racistes sur le terrain. « On donne pratiquement aux gens un permis de tuer, même les enfants palestiniens. »

Lorsque je l'interroge sur la récente et assez inédite - de par la position des États-Unis - résolution de l'ONU, Nurit se montre très réservée. Elle considère que tant que les États-Unis donneront des milliards à Israël, rien de concret ne changera sur le terrain. D'ailleurs Israël n'existe et ne perdure que grâce aux financements extérieurs. Car concrètement, il est en train de sombrer. Nurit m'explique que l'économie s'écroule, le taux de chômage est très élevé, le taux de pauvreté ne cesse d'augmenter (1 enfant sur 3 a faim en Israël, même lorsque ses parents travaillent), le système de santé, le système politique... Tout part en vrille.

En fin de conversation, et puisque nous abordons la question des problèmes économiques d'Israël, je lui demande son opinion sur les gens qui font leur « aliyah » (migrer en « terre d’Israël ») et qui après quelques temps regrettent. Nurit me répond dans un soupir: « c’est bien fait pour eux, ils le méritent. Les français qui viennent ici par exemple, ils sont extrêmement racistes, ils viennent pour « tuer de l’arabe » parce qu’ils sont dans l’idée que les arabes les tuent (en France), ils ont choisi de ne pas voir la vérité sur Israël, et maintenant ça leur tombe dessus. Ils n’ont plus qu’à assumer... »

Non, Nurit Peled-Elhanan ne mâche pas ses mots, et elle sait de quoi elle parle. Ses travaux et ses analyses sont extraordinairement éclairants sur une idéologie dont on a encore du mal, en 2016, à remettre en question et à voir telle qu'elle est vraiment. Une machine de guerre qui broie les êtres humains aussi sûrement qu'elle écrase la paix.

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23 juin 2016 4 23 /06 /juin /2016 15:10
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27 avril 2016 3 27 /04 /avril /2016 07:03
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17 avril 2016 7 17 /04 /avril /2016 16:16
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2 décembre 2015 3 02 /12 /décembre /2015 14:38
~~Samah Jabr – 2 décembre 2015 – Middle East Monitor

~~Samah Jabr – 2 décembre 2015 – Middle East Monitor

Quand je suis arrivée à Paris dans la soirée du vendredi 13 novembre, la personne qui m’accueillait a demandé à notre chauffeur de taxi de nous emmener chez elle, rue de la Fontaine-au-Roi ; le GPS du taxi affichait qu’une fusillade y avait lieu au même moment. Ce n’est que le lendemain matin que nous avons compris tous les détails de la tragédie. Peu après ce voyage à Paris, je me suis rendue à Bruxelles, pour y constater que l’alerte sécurité y avait atteint le « niveau quatre » et que le métro et les écoles avaient été fermés dans la crainte d’un attentat terroriste. Le but de ces deux voyages était de répondre positivement à des organisations de solidarité avec le peuple palestinien qui m’avaient invitée à venir dialoguer avec le public en Europe sur la vie en Palestine occupée.

J’éprouve un attachement pour la France, où autrefois j’ai habité et étudié, et où j’ai gardé des amis et des camarades. Je suis tourmentée par le massacre de ces innocents à Paris, tout comme je le suis par le massacre du Liban à Beyrouth le jour d’avant, les massacres à Bamako la semaine qui a suivi, et le récent massacre des manifestants pro-kurdes à Ankara et des touristes russes dans le Sinaï. L’angoisse pour moi est double : elle touche à la perte de la vie de l’ « autre », aussi bien qu’à l’atteinte grave au système de valeur de mon propre « moi » étendu.

Les attentats de Paris ont fourni une opportunité aux dirigeants israéliens et à leurs partisans, comme d’habitude, pour discréditer la résistance palestinienne à l’occupation militaire brutale d’Israël. Le Premier ministre a prétendu que ceux qui condamnaient les attentats de Paris sans condamner la violence contre les Israéliens étaient des « hypocrites et des aveugles. Derrière ces attentats terroristes se tient l’Islam radical, qui cherche à nous détruire, le même Islam radical qui a frappé à Paris et menace l’Europe tout entière ». Poussant à plus de pensée binaire, à une partition du « nous contre eux » et des « bons contre les méchants », il a ajouté, « Comme je le dis depuis de nombreuses années, le terrorisme islamique militant agresse nos sociétés parce qu’il veut détruire notre civilisation et nos valeurs ». Le ministre de la Défense d’Israël, Moshe Ya’alon, a déclaré dans une même veine : « Ce que nous avons, c’est l’Islam djihadiste qui appelle à la destruction de la culture occidentale ». Ce cliché est diffusé alors même que la plupart des victimes des groupes terroristes « islamiques » sont des musulmans, et que ces victimes sont souvent, tels les réfugiés palestiniens de Syrie, des adversaires d’Israël.

« Ils veulent nous tuer parce que nous sommes juifs », ainsi s’expriment les dirigeants israéliens face aux actes de la résistance palestinienne, dans un déni total du contexte de l’occupation. En France, un article de Véronique Mortaigne et Nathalie Guilbert, publié dans Le Monde deux jours après les attentats de Paris, a fait le lien entre l’attentat contre le Bataclan et les appels antérieurs par des groupes pro-palestiniens au boycott de ce théâtre parce qu’il avait organisé un gala au profit des soldats israéliens. Malgré une condamnation prompte des attentats de Paris par les groupes de résistance islamiques palestiniens, et malgré l’expression de leur solidarité avec leurs victimes, il a circulé, sur les médias sociaux en France, une photo datant de 2012 et montrant des Palestiniens célébrant la signature d’un accord de réconciliation, avec l’affirmation mensongère qu’ils étaient en train de célébrer les attentats dans la capitale française. Ce n’est que plus tard que cette imposture a été révélée. Il y a eu des allusions subtiles de journalistes israéliens que l’Europe méritait les attentats terroristes pour avoir adopté une politique d’étiquetage des produits précisément s’ils proviennent des colonies illégales israéliennes, et aussi des déclarations plus vigoureuses, comme celle du rabbin Dov Lior, « Les méchants de l’Europe imbibée de sang le méritent pour ce qu’ils ont fait à notre peuple il y a 70 ans ». De telles opinions scandaleuses ont été moins fréquentes en Europe.

La vérité, c’est que l’ « État juif » a été créé grâce à une violence excessive et une agression contre les Palestiniens, peuple originaire de cette terre. Comme d’autres peuples autochtones dont la terre a été colonisée, dont les ressources ont été volées, et dont les familles et relations ont été tuées, les Palestiniens ont pu être capables d’utiliser la violence en représailles contre leurs oppresseurs, et pour les dissuader de plus d’oppression, tout en utilisant des campagnes non violentes et des canaux diplomatiques pour obtenir leur libération. Tout cela étant inclus totalement dans leurs droits issus de la législation internationale.

Les Palestiniens sont connus pour leur hospitalité envers les étrangers qui viennent en Palestine, pas pour les tuer. Dans des cas aussi rares que celui du meurtre du militant italien pro-Palestine Vittorio Arrigoni, par un groupe salafiste de Gaza, les auteurs ont été punis par la loi, et condamnés par tout l’éventail des partis politiques. À l’inverse, les meurtres d’une liste interminable de militants et journalistes étrangers par l’armée israélienne ont reçu leur justification (autodéfense), sans punition ni justice. Il est vrai que durant les années 1970, certains Palestiniens ont pris des Israéliens en otage, en des lieux extérieurs aux frontières de la Palestine historique, pour les échanger avec des prisonniers politiques – le plus spectaculaire étant à Munich – mais dont les responsables étaient des groupes de résistance laïcs, qui n’ont jamais utilisé la rhétorique islamique pour faire avancer leur idéologie. Les groupes palestiniens islamiques ont toujours limité leur lutte à la Palestine occupée, et pas au-delà. Ce sont les Israéliens qui se targuent que le Mossad (Institut pour les renseignements et les affaires spéciales) a tué des militants, des intellectuels palestiniens, des représentants de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), et d’autres groupes de résistance, en Europe comme dans des capitales arabes.

Il est ainsi plus justifié de comparer les tactiques de Daesh à celles des groupes terroristes qui sont derrière la fondation de l’État d’Israël, plutôt qu’à celles de la résistance palestinienne. Tant Daesh que l’ « État juif » se sont créés grâce à d’épouvantables massacres, entraînant une population de réfugiés dans leur sillage. Les deux font preuve d’ambitions expansionnistes. La stratégie de Daesh est d’attaquer l’Occident, avec l’objectif de provoquer plus de discrimination à l’encontre des musulmans d’Occident pour les sortir de la « zone grise » ; le Mossad d’Israël a été à l’origine d’attentats terroristes contre des juifs en Iraq, en Égypte et au Maroc, avec l’objectif de les faire venir en Israël. L’opération Sushana dans laquelle des espions israéliens ont programmé des attentats à la bombe contre des juifs égyptiens ; l’attentat intentionnel et soutenu par des avions et des vedettes lance-torpilles israéliens contre le USS Liberty, tuant 34 membres de l’équipage et en blessant 171 autres ; et différentes opérations sous faux pavillon à travers le monde, sont des exemples des crimes odieux perpétrés par les Israéliens pour lesquels les responsabilités ont été imputées ailleurs.

En plus de tirer un profit politique en reformulant l’occupation de la Palestine, en imposant une politique israélienne comme une « guerre contre le terrorisme » et en diffamant le caractère des Palestiniens, les présentant comme des terroristes inhumains, barbares, Israël se saisit aussi de l’opportunité actuelle pour colporter son appareil et sa politique de sécurité comme un « savoir-faire » testé sur le terrain contre les Palestiniens. Ce « savoir-faire » a été utilisé pour réprimer la liberté et la démocratie en Europe et pour exacerber une « guerre contre le terrorisme » dont les victimes comprennent déjà plus de 4000 civils. À un moment où Israël rabaisse l’âge de la responsabilité pénale pour les enfants palestiniens à 12 ans, les envoyant dans les centres d’interrogatoire et les soumettant à la torture, nous ne pouvons qu’espérer que l’Europe s’avancera vers une expansion de son système législatif démocratique et ses efforts pour les droits de l’homme, avec l’objectif d’aider les Palestiniens dans leur quête de justice sur leurs territoires actuellement occupés. C’est avec plus de démocratie, plus de solidarité et plus de politique en faveur des droits humains, et plus d’anti-impérialisme, qu’il sera mis fin au terrorisme, et non par la répression, la pensée binaire et l’exportation des « leçons » israéliennes vers l’Europe.

 

 1

Samah Jabr est psychiatre et psychothérapeute à Jérusalem, elle se préoccupe du bien-être de sa communauté, allant bien au-delà des questions de maladie mentale. Elle écrit régulièrement sur la psychiatrie en Palestine occupée.

 

 

https://www.middleeastmonitor.com/articles/europe/22610-in-the-aftermath-of-paris-the-israeli-way-is-not-the-answer

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28 novembre 2015 6 28 /11 /novembre /2015 14:16
Al Hadidiyah : La persécution d'une communauté

Jeudi 26 novembre 2015, au matin à 7h30, les militaires israéliens...................

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4 octobre 2015 7 04 /10 /octobre /2015 07:35

Non, je n’ai pas envie de parler de la situation là-bas. Ce serait me faire l’écho de trop de désespérance, de renoncement, de résignation et d’un sentiment toujours plus grand d’impuissance.

Non, je n’ai pas envie d’évoquer ce check-point entre Bethléem et Jérusalem où nous avons attendu près d’une heure le bon vouloir des militaires pour que soit ouvert ce passage incontournable. Plus d’une centaine de Palestiniens attendaient là, sous une sorte de hangar en tôle, depuis certainement beaucoup plus longtemps, il faisait chaud, des bébés hurlaient, on sentait la tension monter, monter…. Et s’ils étaient là, ces Palestiniens, c’est parce qu’ils avaient enfin obtenu le sésame des autorités israéliennes pour se déplacer… chez eux !

Non, je n’ai pas envie de parler de ce village de Wadi Foukin, non loin de Bethléem, qui s’étendait sur 19 000 ha avant que les premiers colons ne viennent s’y installer et dont la superficie est aujourd’hui de 3 000 ha. L’étau se referme inexorablement et le maire avoue d’une voix emprunte d’une tristesse poignante qu’il ne sait pas si dans dix ans ils existeront encore.

Non, je n’ai pas envie de rapporter les propos de ce diplomate palestinien en poste à Bruxelles qui, l’espace d’une soirée, a enlevé cette casquette, et avoué que le dialogue est non seulement rompu mais qu’il ne sert plus à rien.

Vais-je parler de ce camp de réfugiés de Dhesheh à Bethléem où ces gens vivent la plus improbable des situations : être réfugiés chez soi, à parfois seulement quelques kilomètres de leurs villages natals d’où ils ont été expulsés et dont certains possèdent encore la clé de leur maison.

Les jeunes, pour les avoir interrogés, savent tous d’où ils viennent, d’où viennent leurs parents, leurs grands-parents. Le légitime droit au retour qu’ils revendiquent semble hautement hypothétique. Surpopulation, chômage, personnel enseignant, médical insuffisant, perfusion internationale mais qui se fait de plus en plus chiche, problèmes d’approvisionnement en eau et en électricité, emprisonnement arbitraire d’adultes, mais aussi d’enfants pour parfois juste un jet de pierre.

Il y a aussi le village de Qalqilia : un seul point de passage –contrôlé par les israéliens- pour entrer dans cette ville de 55 000 habitants. Et puis, un mur –le mur de la honte- le mur de l’apartheid – le mur d’annexion et d’expansion - qui sépare cette localité agricole de ses terres.

Autour du mur, une zone tampon qui diminue d’autant les surfaces cultivables. Et puis des colonies, à perte de vue. Et puis des militaires arrogants. Des contrôles intimidants, déstabilisants, humiliants. Tout est difficile. Tout.

Et cependant, et c’est ce que j’ai vraiment à cœur de dire, et je n’avais envie de dire que cela, ces gens, ces Palestiniens, malgré ce « tout » qui empoisonne leur vie (et à terme les condamne ?) sont accueillants, nous adressent des paroles de bienvenue chaleureuses, nous reçoivent comme des princes, sont généreux, nous remercient de témoigner par notre présence qu’ils sont encore là. Pour combien de temps ? Ne les oublions pas…..

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